Pierre Perrin, La Bascule in Des jours de pleine terre, [en ligne, 2018]

Pierre Perrin-Chassagne
Des jours de pleine terre

[Première partie, suite, poèmes]

La bascule

Comme le pivert au petit bicorne rouge dans le sens du bec, j’ai beau piocher ; nulle écorce ne délivre son secret, sinon que, langue pendante, des chiens flairent des chiennes, jusqu’au fond des impasses. Des chattes se traînent des heures, par terre et par tous les temps, à pleurer sous elles. Le taureau saillit sans trêve ni façons ; le cheval au pré sait mieux la tendresse. Des bois de lits, tous rideaux tirés, grincent, après les tables épicées, mais le secret demeure entier.
M’abstraire, me ravir ? Où les doigts agiles, moins aveugles qu’on peut le croire, quand le bassin manque de s’arracher ? Où la sans pareille, sans un geste que celui de s’effacer sans cesse, attend-elle la tempête immobile ? Où déraciner un plaisir à la mesure de la terre ? Celle, dont à trois pas, de peur pour elle, le souffle manque, au rire plus qu’un sésame volubile, incarnerait-elle ce dieu tellement insaisissable ?
Mais je me le promets presque chaque jour : quand mon tour viendra de tenir dans mes bras la merveille aux seins de rose, aux doigts de prunelles gelées, sur mes lèvres, partout, je volerai en apesanteur, du déluge à la fin des temps. Le cœur partagé fera taire la mort, tellement, à dévisager l’infini sur terre, le moindre pas s’allège.
Comment se joue la moitié de son destin ?
Te souviens-tu, d’entre tes cils, toi qui me lis, de tes doutes, alors, si près de basculer dans l’univers ?

Pierre Perrin, Des jours de pleine terre, [en ligne, 2018]

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